Ça m’arrive toujours en mars. Dès que les jours s’allongent, moi, je me lève. Je me réveille à pile 4h30 du matin. C’est absolument génial. Ce qui m’arrive aussi en mars, c’est un besoin de renouvellement irrépressible. Ça se traduit par un grand ménage chez moi où je dois me freiner pour ne pas tout jeter ou donner. Je brûle presque tout ce que j’ai adoré. J’ai vraiment l’impression que tout s’arrête, que tous les processus arrivent à leur fin, et que je vais prendre une autre direction. Une idée a commencé à germer en moi bien avant le mois de mars, et elle n’attend qu’un peu de place, de vacance, pour fleurir. Ça se passe toujours comme ça, je n’y peux rien. Mais malgré ça, chaque année, j’oublie que ça va avoir lieu. Cette année je me suis encore fait cueillir par surprise. Il y avait pourtant des signes avant-coureurs.
La semaine dernière, à Oxford, j’ai pensé, en regardant les journaux intimes du poète Shelley et ceux de sa femme Mary : « ça donne envie d’en écrire un ». Sur les siens Shelley dessinait, des arbres, des bateaux, faisaient ses comptes... Dans une vitrine on pouvait lire une lettre de Mary qui demandait qu’on lui fasse parvenir en Italie une caisse de ces journaux, toujours les mêmes, achetés dans une banale boutique de Londres je crois, pour que le couple puisse continuer leurs journaux respectifs. Il y avait aussi le « Journal of Sorrows » de Mary, commencé à la mort de Shelley, le 8 juillet 1822. Dans le train de retour j’ai pensé que je ne pouvais pas écrire de journal intime, que ça m’ennuyait. Mais que j’avais besoin d’intimité. J’avais envie de devenir très secrète. C’est exactement ça, « j’ai envie de devenir très secrète ».
Et vendredi dernier, en traversant le British Museum, peut-être parce qu’avec la verrière qui sert de toit on se serait cru dans une serre, la fleur s’est ouverte. Je le traversais par hasard, pour aller prendre mon bus de l’autre côté, mais le hasard a bien fait les choses. Ces cinq minutes de traversée m’ont tout fait comprendre. J’ai compris que je m’étais perdue de vue. J’ai passé les grilles du British Museum en réalisant que ce dont j’avais le plus envie/besoin en ce moment c’était de cultiver mon jardin secret et que pour ce faire ce blog aussi devait partir en vacances. Merci à toutes celles et ceux qui m’ont suivie jusqu’ici.