lundi 28 mars 2011

Un air fin et Watteau (Proust)

Commençons cette semaine avec, dans les bagages, un peu du beau et de l’inspirant de la semaine dernière : Watteau en particulier.
La vie d’Odette pendant le reste du temps, comme il n’en connaissait rien, lui apparaissait avec son fond neutre et sans couleur, semblable à ces feuilles d’études de Watteau, où on voit çà et là, à toutes les places, dans tous les sens, dessinés aux trois crayons sur le papier chamois, d’innombrables sourires.
Du côté de chez Swann
Je les ai vues ce mois-ci, ces feuilles d’études, et pour la première fois je crois. En lisant ce passage aujourd’hui, elles dansent devant mes yeux, comme le sourire d’Odette.
D’ailleurs dans le désordre artiste, dans le pêle-mêle d’atelier, des pièces aux murs encore peints de couleurs sombres (...) l’Extrême-Orient, reculait de plus en plus devant l’invasion du XVIIIe siècle; et les coussins que, afin que je fusse plus «confortable», Mme Swann entassait et pétrissait derrière mon dos étaient semés de bouquets Louis XV, et non plus comme autrefois de dragons chinois. (...) Maintenant c’était plus rarement dans des robes de chambre japonaises qu’Odette recevait ses intimes, mais plutôt dans les soies claires et mousseuses de peignoirs Watteau desquelles elle faisait le geste de caresser sur ses seins l’écume fleurie, et dans lesquelles elle se baignait, se prélassait, s’ébattait avec un tel air de bien-être, de rafraîchissement de la peau, et des respirations si profondes, qu’elle semblait les considérer non pas comme décoratives à la façon d’un cadre, mais comme nécessaires(...). Elle avait l’habitude de dire qu’elle se passerait plus aisément de pain que d’art et de propreté, et qu’elle eût été plus triste de voir brûler la Joconde que des «foultitudes» de personnes qu’elle connaissait.

A l’ombre des jeunes filles en fleur
C’est la semaine des fins et des débuts : le mot fin devra obligatoirement être mis à un article et le premier mot du prochain devra logiquement être écrit. Il ne faut surtout pas se reposer sur ses lauriers. Et à la fin des cours correspond le début des révisions et la lente floraison des examens.
C’est la semaine de la renaissance, du grand ménage de printemps, de petits déjeuners et dîners entre amis, de films irlandais et italiens, de la joie qui monte comme la sève, quand la tête pleine de projets et d’envies on se retient de marcher sur les mains et de faire des cabrioles, quand on a de plus en plus de mal à cacher à certains la joie qui menace d’éclater à tout bout de champ. Une vraie libération.

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